Je voudrais habiter
l'imprévu,
ce temps choisi
de la lenteur,
ce temps de sève
qui ne se gagne pas,
ne se perd pas,
celui, simplement,
qui met au monde.
*
Je voudrais à présent
me glisser dans la paix du monde,
tenter une incursion
au plus près de son écoute,
sentir la déchirure
mauve des ciels d'été,
la fraîcheur haute de la pluie,
l'étincelle d'un premier vol d'étourneau,
suivre des lèvres les ruisseaux,
leur offrande,
l'apparition douce
d'une graine dans la tourbe,
appartenir au mystère neuf
de ce qui toujours se tait
afin de ne pas troubler
la rêverie simple
d'être au monde.
Jean-Christophe Ribeyre, La relève. L'Ail des ours, 2022